LE TARIER DES PRES
L'illustre ornithologue, Paul GEROUDET, écrivait en 1963 " C'est à fin juin que la vaste prairie est dans toute sa gloire fleurie, et mille insectes y bourdonnent, rampent et sautent dès que le soleil vient sécher la rosée. Dans ce poudroiement intense de couleurs et de lumière, un petit oiseau perché sur une ombelle chante par courtes phrases ou s'élance derrière les papillons. Quelques pas et en voici un autre, posté sur un piquet, qui s'agite en nous lançant de petits cris claquants. Tout le long du chemin, dans les herbes grasses et drues, ces TARIERS DES PRES nous accueillent, fleurs vivantes parmi les fleurs".
Dans ma belle région, il me semble qu' il faut attendre les migrations et surtout les mois de mai ou septembre, pour voir cette "fleur vivante parmi les fleurs, ce petit passereau trapu à queue courte, reconnaissable à la teinte fauve orangée chaude et délicate de sa poitrine, qui est parfois finement tachetée chez les jeunes; à son dos brun jaunâtre tacheté de sombre, et surtout à son large sourcil clair, qui est d'un blanc pur chez le mâle adulte.
Le Tarier des prés est pourtant un des hôtes caractéristiques des prairies à foin ou à litière exploitées de manière peu intensive, des marais exondés et des pâturages. Il doit disposer de postes de chant dominants : hautes plantes, buissons, piquets ou clôtures. La modernisation de l'agriculture est la principale cause de sa régression : dans bien des endroits , comme chez moi, son milieu vital a été transformé en cultures intensives. Dans le passé, les prés n'étaient pas fauchés avant mi-juin, après l'envol des jeunes Tariers. Aujourd'hui, la fenaison a souvent déjà lieu en mai, et beaucoup de nids, construits au sol, sont alors détruits. Sa répartition est ainsi devenue très sporadique en Lorraine.
Cette sortie Tarier des prés ne me semblait plus possible cette année, mais c'est en voyant des photos "prises de trop loin" par Martine, mon amie blogueuse et photographe, que j'ai identifié le Tarier et eu l'envie de tenter ma chance pour le retrouver. Une première tentative infructueuse, sur le spot repéré par Martine près de la frontière luxembourgeoise, m'a convaincu qu'il fallait étendre mes recherches. C'est ainsi que j'ai repéré au bout de 3 heures de balade dans la campagne messine, jumelles à l'appui, quelques individus qui chassaient près d'un terrain en friches, après s'être perchés sur les fils barbelés de la clôture d'un parc.
En suivant les conseils du photographe belge, Franck Renard, je suis retourné sur les lieux vendredi dernier, muni de ma tente-affût, d'une chaise pliante, de mon trépied et d'un casse-croûte pour tenir un siège de 5 heures. Première étape: caché sous la tente montée, je me suis approché à 30 m des perchoirs remarqués la veille - pas d'oiseau pendant 1h 30, puis timide retour me permettant de faire quelques photos à trop longue distance. Deuxième étape: au bout de 2 heures, rapproché à 15m, en me cachant sous la tente montée - retour des oiseaux après 1h. Étape finale: au bout d'1h 30 d'attente, rapproché caché sous la tente à 7-8 m du fil utilisé comme perchoir et cela sans déranger les Tariers qui s'étaient habitués à cette masse de feuilles qui se déplaçait toute seule dans la prairie. Résultats près de 400 photos à différentes distances donc de différentes qualités, dont je n'ai conservé, pour l'instant que les deux tiers et dont voila encore quelques exemplaires.
Cinq Tariers chassaient sur place d'où quelques photos de famille/
L'alimentation du Tarier est composée d'insectes qu'li attrape par terre ou en vol, d'où de plus ou moins longues scéances d'observation, posté sur son perchoir en surveillant tout se qui passe à proximité :
Le Tarier des prés est considéré comme sensible et a vu son statut de protection renforcé au niveau européen par la directive Natura 2000. C'est un migrateur strict qui va quitter nos cieux dans quelques jours pour l'Afrique tropicale, avant de revenir (ou repasser) en avril sur ses territoires de nidification. Le coin que je viens de trouver en est-il un ? Aurai-je la chance de partager sa parade nuptiale au printemps prochain ?
En tout cas, le Tarier des prés vous salue bien bas avant son départ:
Sans que le Tarier des prés soit une espèce mythique, je retiens malgré tout une certaine émotion de cette sortie qui, dans sa préparation, sa conception et son déroulement, figurera parmi les plus belles de cette année.
Merci d'avance pour vos commentaires et à bientôt.